Les légendes du Sundgau

 


Le dragon de feu (Ferrette)

 

On croyait, autrefois, qu'un dragon de feu avait son antre aux alentours de Vieux-Ferrette. Il portait dans la gueule une grosse pierre précieuse rouge (un rubis) qui lui servait de lanterne. Et, chose étrange pour un dragon, il poussait l'amabilité jusqu'à éclairer, la nuit, le chemin des passants. Mais il ne fallait pas l'agacer, et même se garder de lui adresser la parole, sinon il se fâchait et devenait méchant. Et chacun, au pays, observait scrupuleusement la consigne.


Par une chaude nuit d'été où le temps était à l'orage, un valet, qui gardait du bétail dans un pré, brûlait de s'assurer si l'on disait vrai, mais il hésitait à le faire. De sombres nuages emplissaient le ciel et des éclairs de chaleur zébraient la nuit, par instants, au-dessus des chaînons du Jura. Peut-être le pâtre crut-il voir en l'un d'eux le fameux dragon de feu ; toujours est-il qu'il l'appela. Alors, un éclair aveuglant illumina la nuit : le garçon vit les nuages sombres fondre sur lui, tandis qu'un fracas épouvantable lui éclata aux oreilles. Et là-bas, dans le ciel, une gueule noire cracha du feu et des flammes. Le troupeau, pris de panique, s'enfuit en beuglant vers la ferme, cependant que le berger, jeté à terre, s'évanouit.


Il reprit conscience à l'aube, vit qu'il s'était blessé en tombant et se releva, tout endolori et avec peine. Les jambes tremblantes, il regagna la ferme et s'écroula au sol en entrant dans la cour. On le porta dans un lit, il répondit d'une voix faible aux questions qu'on lui posait, puis il s'éteignit quand les cloches sonnèrent pour annoncer la messe.